Le code de la sécurité sociale considère comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu à l'encontre de toute personne salariée ou travaillant, par le fait ou à l'occasion du travail, à quelque titre que ce soit. (L. 411-1)
Pour l'accident “classique” survenu pendant que le salarié exécute sa prestation de travail sur le lieu et le temps de travail, peu de questions se posent quant au lien entre l'accident et l'activité professionnelle.
Toutefois, pour des faits survenus hors du temps de travail, hors du lieu de travail, lorsque le salarié n'est pas en train d'exécuter sa prestation de travail, la qualification est plus complexe. Dans une telle situation la jurisprudence admet que l'accident puisse constituer un accident du travail s'il est établi qu'il est survenu par le fait du travail.
La deuxième chambre civile de la Cour de cassation a récemment été confrontée à une question de ce type dans une situation peu ordinaire.
Le 23 janvier 2016, le lendemain de l'annonce de la fermeture du site de production sur lequel il était affecté, un salarié mettait fin à ses jours à son domicile. Sa veuve déclarait un accident du travail et la caisse primaire d'assurance maladie décidait de prendre en charge l'événement tragique comme tel.
L'employeur contestait cependant cette qualification considérant qu'il y avait une absence de lien entre ce suicide et la vie professionnelle du salarié. Il précisait notamment que l'annonce de la fermeture de l'établissement n'était venu que confirmer une information dont les salariés avaient déjà connaissance depuis longtemps.
Cependant, la Cour de cassation juge le 7 avril 2022 que cette annonce apparaît « comme un élément déclencheur du passage à l'acte compte tenu de sa proximité chronologique avec le suicide du salarié survenu le lendemain ». De même, la Cour rappelle que cette annonce avait mis fin à un long processus de réunion pendant lequel le salarié est demeuré dans l'incertitude quant à son avenir professionnel, ce qui l'a confronté à l'isolement et l'incompréhension, que le salarié était très investi, et que ses conditions de travail s'étaient dégradées.
Enfin, vu que pour les juges, aucun élément ne permet de relier ce suicide à la vie personnelle du salarié, il est bien « intervenu par le fait du travail » et constitue par conséquent un accident du travail.
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